Discours du Directeur général du SIAAP, M. Daniel DUMINY :
J’ai l’honneur d’ouvrir ces 4ème rencontres sur le future de l’eau et la joie d’accueillir Monsieur le Président Huchon, Monsieur Santini, Ministre, Président du Comité de Bassin, Monsieur Oudin Sénateur, Madame Constantin Adjointe au Maire de Paris, Mesdames et Messieurs les élus, chers partenaires, chers amis.
De l’enjeu régional au défi européen, notre objectif aujourd’hui est avant tout cette rivière que les Franciliens aiment et que le Siaap s’évertue à protéger tous les jours. Ce fleuve sur lequel nous nous trouvons aujourd’hui, sur cette péniche, en plein coeur de Paris, est fragile et dans le même temps doit demeurer un atout considérable pour le développement économique et touristique de notre région et de toutes les régions qu’il traverse à l’aval de Paris.
A quoi est due cette fragilité ?
Plusieurs facteurs que je voudrais rapidement éclaircir.
La concentration de la population, près de 12 millions d’habitants sur les rives d’une rivière dont le débit d’étiage a dû mal à dépasser 100m3/s est sans aucun doute unique en Europe Le poids de l’agglomération parisienne dont le PIB représente plus de 20% du PIB national sur seulement 2% du territoire.
Une imperméabilisation des sols qui inexorablement croît malgré une prise de conscience des Maires au début des années 2000. Un simple exemple, l’ensemble des surfaces imperméabilisées du bassin de la Seine qui compte 97.000km2 est de 16.000km2. Pour la seule RIF la surface imperméabilisée est de 520km2 soit plus de 30%. Le taux d’imperméabilisation de 15% en moyenne sur la région peut atteindre 45% pour le département de Hauts de Seine et près de 70% pour la Ville de Paris intra-muros.
Un débit faible en comparaison des grands fleuves européens comme le Rhin, le Danube, la Tamise. A l’étiage le Siaap est ainsi le premier affluent de la Seine avec en temps sec un débit rejeté de près de 30m3/s soit le tiers du débit de la Seine à l’aval de Conflans Ste Honorine.
La Seine est le fruit de l’activité humaine et présente à ce titre un caractère fortement anthropique qui ne favorise pas le développement de la vie.
Avec nos partenaires la RIF et l’AESN nous avons en 2000 signé un contrat de bassin qui se voulait être la première phase de la reconquête du milieu naturel. De très importants crédits ont été mobilisés à une hauteur jamais atteinte par notre institution et apparemment sans équivalent en Europe. Ces investissements ont été mis au service de l’amélioration de la qualité de traitement de nos usines dans le cadre du principe de traiter mieux, au plus près, la pollution.
Doublement de la capacité de Valenton : 600.000m3
Colombes : 240.000m3
Mise en service de l’usine de Triel sur Seine : 100.000m3
Début des travaux de Marne Aval : 70.000m3
Et bientôt le lancement de notre dernière usine La Morée au Blanc-Mesnil en coopération étroite avec le Syctom sur un projet de méthanisation d’un mélange de la partie fermentescible des ordures ménagères, des boues de notre future usine et de déchets verts. Tout cela afin de rééquilibrer nos capacités épuratoires sur le territoire et donc diminuer la capacité d’Achères, avec la démolition des bassins combinés d’Achères III cette année.
Tout un symbole, Monsieur le Président Huchon. En parallèle la pollution des rivières par les eaux de ruissellement en temps de pluie, est devenue une priorité en milieu fortement urbanisé comme le nôtre. De nombreux ouvrages de stockage ont été créés d’autres comme TIMA sont en construction.
Mais comme le montre les deux courbes, l’évolution de notre capacité de stockage ne fait que suivre l’évolution de l’imperméabilisation des sols. En un mot les centaines de millions d’Euros investis limitent les risques de débordement mais peuvent s’avérer complètement obsolètes si l’imperméabilisation continue – le concept d’aggravation zéro doit aujourd’hui être dépassé. L’amélioration des traitements de l’azote et du phosphore est la priorité du Siaap dans le cadre de la directive ERU.
La mise aux normes de l’usine Seine aval est
donc fondamentale s’agissant de plusieurs millions d’habitants et est extrêmement urgente. Cette course contre la montre mobilise toutes les forces vives du Siaap, s’agissant de l’usine la plus importante d’Europe. Tous nos efforts donnent des résultats très encourageants. L’oxygène contenue dans la Seine est un très bon indicateur, intégrateur de quasiment l’ensemble des paramètres de la santé de la Seine.
L’oxygène, l’eau, la vie et donc les poissons là aussi les résultats sont spectaculaires. Les 29 espèces aujourd’hui recensées par le Conseil Supérieur de la Pêche le prouvent et bientôt, pourquoi pas, des saumons. Concernant l’impact lié aux rejets d’azote en Seine, l’influence de notre usine d’Achères est significative (courbe noire) au droit du rejet mais aussi sur plusieurs dizaines de km. La mise en service de l’usine de traitement de l’azote dans les prochains jours lors de la venue de Madame la Ministre Nelly Ollin va dans le courant de l’année 2007 avoir une incidence fondamentale (courbe orange).
De la même façon le taux d’O2 qui compte tenu de la présence des composés azotés en Seine décroît de manière importante jusqu’au barrage de pose devrait dès le milieu de l’année 2007 se stabiliser aux alentours de 8mg/l permettant ainsi de gagner 2 classes de qualité d’eau de rivière. Pour conclure l’Ile de France est riche de milieux naturels et de paysages. Pourtant la conquête d’espaces urbains se fait aux dépens de ces espaces naturels. Le mode de développement urbain conduit à une perte de qualité de vie et d’hygiène en zone dense, et favorise la ségrégation et l’apparition des conflits, l’augmentation du coût foncier et la réduction des superficies disponibles par habitant. La ville n’est une conséquence fâcheuse de l’activité mais une nécessité sociale, c’est un espace de communication et de liberté à préserver.
La ville est souvent perçue comme subie car son utilisation génère des nuisances. La construction physique, processus continu de la ville constitue une adaptation permanente et nécessaire. La ville ne se développe pas par hasard, elle est le fruit de décision humaine. On peut regretter que ces décisions ne soient pas forcément coordonnées et perçues dans une vision globale de la Ville, de l’Agglomération.
Le Siaap est ainsi lancé dans une course poursuite afin de lutter contre la pollution engendrée par l’activité humaine, cette forte concentration d’activités économiques, cette imperméabilisation des sols qui se poursuit. Une grande partie du retard va être comblé dès le début l’année prochaine. Des efforts très importants restent à faire, nous en sommes conscients et prêts à relever avec nos partenaires ce défi. Cette responsabilité collective d’une nouvelle urbanité que le Siaap appelle de ses voeux, doit pouvoir s’inscrire dans la mise en oeuvre d’un mode de développement durable qui implique l’invention de nouvelles façons d’utiliser les ressources et l’espace. Le développement économique c’est transformé en risque pour une grande partie des Franciliens, à nous collectivement de faire de ce risque une opportunité porteuse d’espoir.