INTRODUCTION
L'eau est devenue l'une des principales préoccupations actuelles. On voit se réunir le Forum Mondial de l'Eau avec la participation des organisations telles que l'Union des Collectivités Locales du Monde, la Banque Mondiale, l'Organisation Mondiale de Santé, et des industriels, spécialistes, académiciens, ministres, administrateurs et les organismes non-gouvernementaux. La Conférence Nationale de l'Héritage Américain des rivières (American Heritage Rivers National Conférence) qui s'est tenue à Portland en Oregon le 15 novembre 2000 est une autre manifestation de cette préoccupation.
Cette prise de conscience répond à un double constat : d'une part l'eau est menacée par la pollution et d'autre part la consommation d'eau risque d'augmenter avec la pression démographique.
La Turquie se situe entre les pays développés et les pays en voie de développement. Elle a souffert d'une forte natalité jusque dans les dernières années, le besoin d'une industrialisation rapide lui a coûté cher à cause des problèmes de pollution et de la perte de l'équilibre écologique qui en résulte. Elle a perdu une partie de ses forêts et le potentiel de l'eau douce n'est pas très important en Turquie malgré ses 26 bassins existant. Elle veut donc reconstruire l'équilibre perdu et être beaucoup plus attentive en ce qui concerne le domaine de l'eau douce. C'est pourquoi, cette présentation se concentrera sur l'analyse du régime juridique de l'eau douce et sur l'organisation concernant la recherche, la protection, l'utilisation et la distribution de l'eau par les établissements publics et par les collectivités locales ainsi que l'accès des particuliers à l'utilisation de cette eau.
Nous verrons successivement :
- le régime juridique de l'eau en Turquie.
- l'organisation à l'échelon national et local concernant l'eau.
- La distribution de l'eau ; son régime et le droit d'accès des particuliers à l'eau.
Retour Haut de page
I- Le régime juridique de l'eau en Turquie
La règle générale stipule que les eaux appartiennent au public, parce qu'elles font parties des richesses et des ressources naturelles du pays. La Constitution turque dispose (Art.168) que ces richesses et ces ressources relèvent de la surveillance, la compétence et l'autorité de l'Etat et que seul l'Etat a le droit de les exploiter. Pourtant la Constitution prévoit aussi, en assouplissant la règle, le partenariat de l'Etat avec des personnes physiques ou morales au sujet d'une telle exploitation et accepte même une délégation dans ce domaine en faveur des personnes privées, et ce à condition d'en préciser, par une loi, la durée et de fixer les normes que ces personnes doivent respecter.
Mais pour avoir une idée plus claire sur le régime juridique de l'eau en Turquie il faut partir d'une distinction faite entre les eaux superficielles et les eaux souterraines.
1- Les eaux superficielles
Les eaux superficielles, telles que les fleuves et les autres eaux courantes qui les nourrissent font parties du domaine public naturel. Les lacs, y compris les lacs artificiels qui se forment à la suite de la construction des barrages en font aussi partie. Personne ne peut donc prétendre être le propriétaire de ces eaux.
Cette situation juridique entraîne en revanche une conséquence tout à fait logique. Le public peut utiliser ces eaux. Mais cette utilisation est subordonnée à l'accomplissement de deux conditions : de ne pas dépasser les limites d'une utilisation générale et égale à tous et de ne pas empêcher les autres usagers éventuels d'en profiter.
S'il s'agit d'utilisations spécifiques ou individuelles, on entre alors dans la zone de l'usage particulier ou extraordinaire du domaine public ; ce qui entraîne la délivrance d'autorisations et un contrôle intrinsèque et approfondi de police administrative sur les activités des usagers.
2- Les eaux souterraines
Pour les eaux souterraines, en principe, la même règle s'applique. Néanmoins certaines nuances seront à apporter dans les paragraphes suivants.
En effet, selon l'expression de la loi spécifique (loi no :167 du 16.12. 1960 sur les eaux souterraines) : la recherche, l'utilisation, la protection et l'enregistrement de ces eaux stagnantes et les eaux courantes sont soumis à cette loi.
Mais, ce régime juridique de l'eau en Turquie n'empêche pas les personnes autres que l'Etat (personnes privées ou personnes publiques, personnes physiques ou morales) d'utiliser les eaux souterraines de leurs propriétés et des terrains de leurs voisins.
Avant de finir ce bref paragraphe concernant les généralités du régime de l'eau en Turquie j'ajouterai qu'il y a une législation et une réglementation assez détaillées 2 et donc quelque peu hétérogènes, encadrant les différentes catégories d'eaux : comme les eaux thermales (de YALOVA par exemple, justement il y a une loi spéciale pour ces eaux) et les eaux des sources minérales naturelles qui appartenaient, à l'époque de l'Empire Ottoman, à des fondations mais qui sont gérées aujourd'hui par un établissement public économique, il y a aussi des eaux qui font partie du domaine des ruines historiques (antiques).
Les solutions des litiges nés entre les personnes publiques et/ou les personnes privées qui peuvent découler des autorisations ou des refus d'autorisations, des décisions d'affectation des eaux à ces personnes relèvent du juge administratif. Par contre les litiges résultant du partage des eaux, des droits des voisins sont déférés au juge judiciaire.
.../...
CONCLUSION
Le régime juridique de l'eau, son organisation et les droits des particuliers d'accès à l'eau en Turquie montre la diversité des problèmes du pays dus à des conditions géographiques, météorologique, économiques et sociales ; sans jamais oublier l'aspect géopolitique et donc international de la question de l'exploitation de l'eau dans cette partie du monde.
Une législation qui remonte jusqu'aux années où la République était fondée et les droits traditionnels de certaines fondations (transformées ensuite à un établissement public économique : "Les Eaux des Sources des Fondations ") semblent obliger l'Etat à prendre des mesures de coordination et aussi -dans un très prochain avenir - de promulguer de nouvelles dispositions législatives visant la réorganisation et le renouvellement de régime juridique de l'eau. Cet espoir existe parce que la Turquie, en se heurtant contre les problèmes de pollution, de sécheresse et de perte de la qualité de l'eau a déjà pris l'initiative pour reconstruire le régime de l'eau. La Turquie est actuellement membre actif de "Conseil Mondial de l'eau" qui vient d'organiser ses dernières réunions des gouverneurs à Istanbul, à Tanlýurfa et r Ankara, à l'occasion de la Fête de l'eau dans le monde que l'on célcbre chaque année le 22 mai.
La Turquie conclut aussi des accords internationaux avec certains pays, comme les Pays-Bas par exemple pour subventionner les projets d'irrigation et pour profiter d'une assistance technique assurée par les spécialistes du pays en question (J.O. Turc du 26 février 2001).
Les litiges concernant l'utilisation, l'exploitation et le partage des eaux augmentent. En effet, on constate qu'il y a des litiges ;
- entre les différentes collectivités
- entre les différentes régions d'un même pays, comme le montre une nouvelle parue dans le quotidien " Le Monde " du 10 février 2001 sous un titre assez frappant d'ailleurs : " Le Partage de l'eau déchire Espagne " : " Un plan de gouvernement espagnol pour permettre aux zones arides du sud de recevoir l'eau des zones pluvieuses du nord suscite des déchirements entre les régions du pays promettant une dure bataille politique et judiciaire ".
- entre les différents pays d'une même région, comme la Turquie, la Syrie et l'Irak ; Il s'agit du problème de partage des eaux de l'Euphrate et du Tigre sur lesquels la Turquie a construit des barrages. Le projet de GAP, qui en est un exemple, suscite des frottements entre la Turquie et les deux autres pays.
Voilà, comment, le partage de l'eau menace la paix aussi bien à l'échelon local et national qu'à l'échelon international.
Que peut-on vouloir de plus d'un sujet pour qu'il puisse attirer l'attention des politiciens, des académiciens, des techniciens et enfin les peuples ?
Retour Haut de page