DISCOURS DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Palais de l'Élysée -- Vendredi 22 Janvier 2010
Monsieur le Ministre d'État,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Haut commissaire,
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Conseillers,
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais commencer ces vœux en ayant une pensée pour toutes les victimes du tremblement de terre en Haïti. Face à cette terrible catastrophe, le monde
associatif a, une fois encore, montré sa générosité et sa force de mobilisation. Soyez-en profondément remerciés.
Il y a un an, une crise financière sans précédent frappait le monde. Pas plus que les autres pays la France n'a été épargnée. Avec le gouvernement, nous nous sommes
immédiatement mobilisés pour y faire face.
Aujourd'hui, les premiers résultats sont là : depuis six mois, la France a renoué avec une croissance positive. Pour autant, naturellement, la crise n'est pas
derrière nous, vous le savez bien, vous qui intervenez chaque jour auprès de nos compatriotes. Et nous ne serons pas sortis de la crise tant que le chômage n'aura pas
baissé et que les Français auront encore à en souffrir. Avec la crise, la cohésion sociale est particulièrement mise à l'épreuve. Plus que jamais nous avons
besoin de votre concours. Il y a dans la société civile, et en chacun de nous, des ressources, une énergie considérables. Et vous les incarnez chacun à votre
façon, au-delà de vos différences -- peut-être même grâce à vos différences. Aujourd'hui, je souhaite que notre pays sache mieux mettre à profit
votre force de proposition. Il nous faut tirer les leçons de ce qui s'est passé depuis un an. Il nous faut réfléchir au monde dans lequel nous voulons vivre. Vous êtes
les acteurs du changement dont la France a besoin. Je vous demande de nous aider à faire surgir de la crise un monde plus juste et plus humain.
Pour y contribuer, la société civile a besoin d'un lieu où s'exprimer et se faire entendre : telle est la vocation du Conseil économique, social et environnemental. Cette
assemblée doit être le lieu où dialoguent toutes les voix de la société, où se confrontent les différents points de vue sur la modernisation de notre pays. Pour cela,
il était nécessaire, chacun en conviendra, que cette institution soit plus représentative de notre société et de ses différents visages. Nous avons donc engagé une
profonde rénovation du Conseil économique, social et environnemental qui va renforcer son rôle, sa légitimité et, je l'espère, sa réactivité. Tel est le sens de la
révision constitutionnelle votée en juillet 2008 et du projet de loi qui la complète. Votre assemblée sera rajeunie, par l'abaissement de la limite d'âge, la limitation
du nombre de mandats, la création d'un collège dédié aux jeunes. Les femmes y prendront toute leur place, puisque désormais les nominations des conseillers seront
soumises à l'obligation de la parité. De nouvelles forces, représentatives de toute la vie de la cité, viendront rejoindre cette enceinte. Je pense notamment aux
organismes agissant dans le domaine de la protection de l'environnement et du développement durable. Je pense également aux associations œuvrant dans des domaines aussi
variés que l'aide aux personnes handicapées, l'éducation populaire, la culture, la science, le sport. Ce Conseil plus représentatif disposera de nouvelles compétences.
Vous aurez, bien sûr, l'indépendance et la liberté de ton. Mais encore faut-il que votre avis soit sollicité ou que vous puissiez le proposer au moment opportun. Le
Conseil sera plus proche du monde qui l'entoure. Il se voit reconnaître comme un interlocuteur à part entière avec de nouveaux pouvoirs. Vous pourrez ainsi être
saisis par voie de pétition, dès lors que 500 000 Français se seront exprimés en ce sens. Vos compétences seront élargies à l'environnement, et notamment aux lois
de programmation proposées en ce domaine. Vous pourrez dialoguer non seulement avec le gouvernement, mais également avec le Parlement. Enfin, vous pourrez associer à
vos travaux de grands témoins et des experts.
Faire participer la société civile et ses représentants à la vie de notre pays, c'est, bien sûr, aider les associations à se développer. Comme force
intermédiaire entre l'État et le marché, l'association est un élément de régulation de notre société, un vecteur de fraternité, un élément d'équilibre. Chacun de
vous s'est engagé avec ses convictions, certains dans l'espoir de changer le monde, d'autres dans la volonté de faire le bien autour d'eux, d'autres encore, pour partager
des idées ou des activités qui leur sont chères. Mais tous, vous portez ces valeurs du bénévolat en donnant sans compter votre temps et votre énergie. En cette période
de crise, vous êtes en première ligne pour aider nos concitoyens. On vous demande d'assumer davantage de responsabilités, dans de nombreux domaines, de l'insertion des
jeunes à la lutte contre la précarité. Face à ces attentes, on parle trop peu des transformations que vous accomplissez pour les Français. Pour mieux les
mettre en valeur, j'ai demandé au gouvernement d'organiser une Conférence de la vie associative, qui s'est tenue le 17 décembre. Malheureusement, j'étais à
Copenhague et je regrette vivement de ne pas avoir été à vos côtés. Mais ce dialogue, je l'ai voulu parce que mon ambition, c'est de nouer un partenariat durable
avec vous. Pour que vous, les associations, soyez davantage écoutées et mieux accompagnées. Nous avons pris des mesures concrètes qui apportent de premières réponses aux
attentes que vous avez formulées : la simplification des demandes d'agréments, l'amélioration de votre représentation institutionnelle, la visibilité de l'engagement
financier de l'État. Nous avons également renforcé la formation des bénévoles et valorisé leurs compétences. La feuille de route qui a été fixée par Martin HIRSCH,
qui connaît bien vos attentes et qui a toute ma confiance, doit se traduire concrètement et rapidement. Il vous soumettra un agenda de travail dans les prochains jours. Et
ce n'est qu'une première étape de tout ce que nous allons faire en 2010.
Permettez-moi simplement d'évoquer un projet qui me tient à cœur, la mise en place d'un service civique. Pour les jeunes, c'est une chance unique de s'engager, de
s'approprier pleinement les valeurs de notre pays, de ne pas être seulement spectateurs du monde qui est en train de se construire, mais en être acteurs. Pour notre
société, c'est un moyen de renforcer la cohésion sociale, en associant toutes les générations au service de la communauté. C'est aussi un moyen de favoriser la mixité
sociale et de permettre aux jeunes de s'enrichir en découvrant d'autres milieux et d'autres cultures. Ce service civique sera volontaire, car il n'y a pas de véritable don
sans la liberté de donner. Il sera universel, car destiné à tous les jeunes. Il sera républicain, car il marquera une véritable étape dans la vie d'un jeune
citoyen. Le Parlement examine actuellement la proposition de loi créant le service civique. Martin HIRSCH s'y investit beaucoup.
Cette année, 10 000 jeunes feront l'expérience de ce service. À terme, nous visons 10 % d'une classe d'âge c'est-à-dire 70 000 jeunes. Chacun aura le choix de son
engagement. Du soutien scolaire à l'aide aux personnes âgées, en passant par la protection de l'environnement et l'aide aux pays en développement, il y a mille et
une façons de s'accomplir en aidant les autres, le sport aussi, bien sûr. J'attends beaucoup de ce projet. Je sais que les associations sont prêtes à se mobiliser
pour qu'il soit une réussite. Je le dis devant mes amis les sapeurs-pompiers, 200 000 volontaires. Je sais que vous l'attendez et qu'en même temps, cela vous inquiète.
D'ailleurs, si vous n'étiez pas inquiets, vous ne seriez pas Français, l'inquiétude étant une des valeurs propres à nos concitoyens ! Mais vous voyez que c'est
quand même pour vous un moyen de renouveler considérablement le potentiel de bénévolat, même s'il y a une rémunération. Là aussi, il faudra encadrer, mais
imaginez-vous ce que cela représente ? Dès cette année, 10 000 jeunes à la disposition du mouvement associatif pour faire un service civique, à terme, 70 000.
C'est une force considérable pour les associations, quel que soit le domaine encore une fois, puisque nous, nous ne poserons pas de conditions. Tous les domaines, à
partir du moment où il y a de l'engagement, sont positifs. Cela faisait des années que l'on en parlait, j'avais commandé à Luc FERRY -- et je l'en remercie -- un
rapport sur le service civique. Moi, les rapports, j'en fais des décisions, pas un rangement dans une armoire : voilà ce qui est important. Et ce projet pour le
mouvement associatif, c'est quelque chose d'extrêmement important.
Entre la réforme du Conseil économique social et environnemental (pour les associations, vous aviez cinq représentants, si mon souvenir est exact, et je crains qu'il ne le
soit) et le service civique, ce sont quand même des moyens considérables qui vous seront donnés. Cela témoigne de la conception qu'a le gouvernement du rôle des
associations. D'ailleurs, dans le processus du Grenelle de l'environnement, cela a été un élément fantastique que l'association des ONG, qui ne sont rien d'autre que des
mouvements associatifs, dans un débat qui était un peu convenu, habituel, entre les forces politiques et les forces syndicales : cela a mis beaucoup de fraîcheur, beaucoup
d'envie de faire des choses et non pas de commenter des choses en bien ou en mal. Au fond, c'est à partir de cette expérience que nous avons décidé d'aller plus
loin.
Vraiment, retenez de ces vœux ma volonté de ce partenariat durable avec vous, dans la liberté de chacun. Par le passé, vous en avez tellement entendu et si peu vu -- je
veux dire de ce vous avez entendu, pas de ce que vous vivez ! Moi, je sais que le monde associatif est un monde profondément juste, honnête au sens objectif, mais je sais
que vous saurez faire la différence entre l'action et le commentaire de l'action. C'est l'action que je vous propose, rien d'autre, et dans tous les domaines. Je le dis
devant Roselyne BACHELOT et Rama YADE pour le sport -- vous savez combien je suis un passionné, combien je pense que le mouvement sportif a une place dans le mouvement
associatif -- mais je le dis aussi devant Nora BERRA et Fadela pour tout ce qui concerne la famille, les personnes âgées, la politique de la ville, tout ce dont notre pays a
besoin, devant aussi Xavier DARCOS qui veille sur le dialogue entre les uns et les autres, et, bien sûr, Jean-Louis BORLOO et Chantal JOUANNO, qui sont aux premières loges
avec tout le domaine environnemental. Prenez comme une chance ce nouveau conseil et ce service civique.
Vous l'aurez compris, c'est du fond du cœur que je vous souhaite une bonne année 2010 pour vos associations et pour votre Conseil, dont j'ai conscience que je l'ai un peu
agité l'an dernier. Monsieur le Président, il avait besoin d'un peu d'agitation, dans le bon sens ! Dans un monde qui change, les forces vives de la Nation doivent
être vives et fortes. Tout cela avait besoin de rafraîchissement, au bon sens du terme. Je ne crains pas le dynamisme, l'énergie, l'engagement -- fût-il en désaccord avec
ce que nous faisons : tout cela est positif pour un pays. Ce que je crains, c'est l'immobilisme, les éternels critiques spectateurs, la nostalgie d'un passé qui n'existe
plus, la non-prise en compte des raisons qui nous ont fait échouer ou gagner. Le fait est que nous sommes au XXIe siècle et que l'on ne peut pas, au XXI e siècle, agir
comme si on était au siècle précédent, voilà ce que je pense. Bonne année à tous.
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