Reportage choc sur une civilisation barbare
De même que certains spots télévisés de la sécurité routière nous atteignent et nous donnent la sensation d'éprouver un accident dans notre chair, " Notre pain quotidien " nous entraîne sur les mêmes voies, dans le domaine de l'alimentation, par la variété et la qualité filmographiques des séquences.
Premier constat à l'issue de la projection : on n'élève plus les animaux pour nous fournir de la nourriture, on les cultive comme des tomates et des courgettes hors sol. Et il en faut des bestiaux pour nourrir les humains !
Autre particularité de ce film : il est muet. Comprenez qu'aucun commentaire ne vient éclairer votre cerveau de spectateur, aucun sous-titre, aucune carte pour vous permettre de localiser les scènes.
Vous voici travailleur-boucher-bourreau découpant en deux parties bien égales un corps de ruminant, "éleveur" de volailles poussant à coups de pied les volatiles récalcitrants qui refusent de se laisser "avaler" par un énorme et bruyant "balai brosse", ou femme aux grosses pinces chargée de couper les pieds des porcs morts qui passent par centaines tous les jours devant vous... et que dire du sperme volé aux taureaux reproducteurs, de l'insémination artificielle des truies... triste bonheur des industriels et de la civilisation productiviste !
Ces femmes et ces hommes sont-ils encore humains ?
De quoi rêvent-ils pendant leur sommeil quand leur journée s'est déroulée avec les entrailles de leur nourriture de demain ?
Ils sont devenus les assistants des machines, robots auxiliaires capables (et coupables) d'erreurs, à l'instar des ouvriers du film "Les Temps modernes" de Chaplin (1936).
Dans votre cerveau surpris surgit immanquablement la référence au film "Soleil vert" de Richard Fleischer (1973) même s'il ne s'agit pas de chair humaine. De même vous êtes projeté dans la série télévisée "V" ou des lézards humanoïdes extraterrestres envahissent la Terre et font des humains leur réserve de nourriture.
Les récentes conférences de janvier et février 2007 sur les modifications climatiques (
Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) et la
Conférence de Paris pour une gouvernance écologique mondiale nous ont amèrement rappelé que les ressources s'épuisent et que notre planète est polluée du fond de l'océan au sommet de l'Himalaya.
Bien sûr nous avons besoin de nourriture. Bien sûr de tout temps l'homme a élevé des animaux pour subvenir à ses besoins. Evidemment il nous faut d'immenses terres cultivées pour la pomme de terre, le blé, le tournesol... Mais où donc est passée la vie, celle de la Nature, le respect qu'elle inspire et avec elle la dignité de l'Homme ?
Il faut voir et certainement revoir "Notre pain quotidien". Témoin d'une époque où dans tous les médias il n'a jamais été autant question d'égalité, de respect de l'autre, de la nature, quand c'est tout son contraire dans les faits.
Quelles seraient les causes de ce déploiement de forces cruelles présentées comme utiles à 6,5 milliards de bipèdes destructeurs ?
A côté des appétits financiers de sociétés très puissantes, la croissance démographique en est une de taille.
Il suffit de faire le bilan de la consommation d'un humain, de sa naissance à sa mort, et d'évaluer son empreinte écologique pour se rendre compte qu'il va bien falloir envisager de réguler les naissances afin d'enrayer l'explosion quantitative de cette population spécifique au détriment des milliers d'espèces qui vivent sur le même vaisseau spatial.
A l'heure actuelle, ce débat n'est pas encore d'actualité.
Bon film
NB : OUR DAILY BREAD a gagné le Grand Prix du Festival International du Film d'Environnement 2006 (Paris du 22 au 28 novembre 2006)
Richard Varrault
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