Bruxelles, le 2 avril 2004
La Commission européenne a décidé de poursuivre des procédures d'infraction contre la Finlande dans deux affaires distinctes relevant de la législation communautaire relative à l'environnement. D'une part, elle traduira la Finlande devant la Cour de justice européenne pour ses efforts insuffisants en vue d'enrayer le déclin de la population d'écureuils volants (Pteromys volans), une espèce strictement protégée en vertu de la directive "Habitats" et que l'on ne trouve qu'en Finlande. D'autre part, elle a envoyé à la Finlande un avis motivé pour défaut d'épuration des eaux urbaines résiduaires en infraction avec la législation européenne sur la protection des eaux. En omettant de prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire l'excès d'éléments nutritifs dans les eaux urbaines résiduaires, la Finlande contribue à la surcharge de ses mers. En particulier, la mer de l'Archipel et le golfe de Finlande, qui font partie de la mer de Botnie, ainsi que la mer Baltique proprement dite sont altérés par les rejets excessifs d'azote. Cet élément nutritif favorise la prolifération indésirable du phytoplancton et nuit à l'écologie marine locale. La directive européenne relative au traitement des eaux urbaines résiduaires exige l'élimination de l'azote des effluents des agglomérations de plus de 10.000 habitants. La Commission considère que les villes finlandaises qui rejettent leurs eaux résiduaires urbaines dans la Baltique ne les épurent pas convenablement de leurs nitrates. Des mesures semblables sont prises contre la Suède.
Commentant ces décisions, Mme Margot Wallström, commissaire à l'environnement, a déclaré : "La Finlande est le seul endroit de l'UE où l'on trouve des écureuils volants; il importe donc qu'elle reconsidère ses procédures destinées à assurer la conservation de cette espèce menacée. J'invite également les autorités finlandaises à améliorer le niveau du traitement des eaux résiduaires en vue de contribuer à améliorer la qualité de l'eau dans la région balte."
La directive "Habitats"
La directive "Habitats"(1) crée un système de protection complet pour une série d'animaux et de plantes, ainsi que pour une sélection de types d'habitats. Elle exige que les États membres protègent strictement un certain nombre d'espèces animales, telles que le loup et l'écureuil volant. Cette protection stricte implique l'interdiction de toute forme de mise à mort intentionnelle et de la détérioration ou de la destruction des sites de reproduction et des aires de repos.
La directive prévoit des exceptions appelées "dérogations" pour un certain nombre de raisons.
Parmi celles-ci figurent la mise à mort de certains spécimens, à condition qu'elle soit strictement contrôlée et ne concerne qu'un nombre limité d'individus. Ces dérogations sont néanmoins soumises à des conditions sévères. En particulier, il ne doit pas y avoir d'autre solution satisfaisante et elles ne doivent pas nuire au maintien des espèces concernées dans un état de conservation favorable.
L'état de conservation de l'écureuil volant en Finlande est insatisfaisant. Les préoccupations de la Commission concernent la manière dont la législation finlandaise applique l'interdiction de détériorer et de détruire les sites de reproduction et de repos, ainsi que les mesures pratiques de sauvegarde de ces sites. Plus précisément, la législation finlandaise limite le champ d'application de l'interdiction aux lieux de reproduction et de repos qui sont "clairement perceptibles dans la nature". Or, comme ces sites sont difficiles à repérer pour les profanes, l'interdiction est largement vidée de son sens. En outre, les dispositions pratiques destinées à la mettre en oeuvre présentent des lacunes. C'est notamment le cas des procédures visant à assurer une liaison étroite entre les experts en conservation de la nature - qui savent où vit la population d'écureuils - et les autorités responsables des activités sylvicoles et des réalisations en matière d'infrastructure qui sont susceptibles d'entraîner la destruction des lieux de reproduction et de repos de cette espèce. Bien que la Finlande ait manifesté son intention de revoir sa législation et d'améliorer les dispositions pratiques, les mesures promises n'ont toujours pas été adoptées et notifiées à la Commission.
La directive relative au traitement des eaux urbaines résiduaires
Cette directive(2) traite de la pollution par surcharge nutritive, bactérienne et virale causée par les eaux urbaines résiduaires. Les eaux résiduaires qui déversent des taux excessifs d'éléments nutritifs (notamment le phosphore et l'azote) dans les rivières et les mers provoquent ce que l'on appelle l'eutrophisation. Ce phénomène se produit en cas de prolifération des organismes photosynthétiques comme les algues - dans l'eau. Il entraîne un abaissement du taux d'oxygène (les microorganismes dégradent les algues mortes et autres matières organiques) et d'autres effets écologiques négatifs. Il aboutit finalement à un déséquilibre entre les organismes présents dans l'eau et une réduction de qualité de celle-ci. Cette évolution peut modifier brutalement l'écosystème d'un lac ou d'une mer, voire provoquer la mort de nombreux poissons. En introduisant des bactéries et des virus potentiellement nocifs, les rejets créent également des risques pour la santé humaine dans les eaux qui sont utilisées pour la baignade ou la culture de mollusques et de crustacés.
La directive enjoint aux villes de respecter des normes minimales de collecte et de traitement des eaux usées dans des délais qu'elle fixe en fonction de la vulnérabilité des eaux réceptrices et de la taille de la population concernée.
Elle exigeait que les États membres identifient les zones sensibles pour le 31 décembre 1993. Des normes strictes pour le rejet des eaux résiduaires directement dans ces zones ou leurs bassins de captation par les villes de plus de 10.000 habitants devaient être mises en place pour 31 décembre 1998. Cette échéance s'applique également à l'extraction des éléments nutritifs qui favorisent l'eutrophisation.
La procédure juridique
L'article 226 du traité donne à la Commission le pouvoir d'ester en justice contre un État membre qui manque à ses obligations. Si la Commission considère qu'il peut y avoir une violation de la législation de l'UE qui justifie l'ouverture d'une procédure d'infraction, elle adresse une « lettre de mise en demeure » à l'État membre concerné en demandant qu'il soumette ses observations dans un délai déterminé, généralement de deux mois.
Compte tenu de la réponse ou de l'absence de réponse de l'État membre concerné, la Commission peut décider de lui adresser un « avis motivé ». Cet avis expose clairement et définitivement pourquoi la Commission considère qu'il y a eu infraction au droit communautaire et invite l'État membre à y remédier dans un laps de temps déterminé, généralement de deux mois.
Si l'État membre ne se conforme pas à l'avis motivé, la Commission peut décider de saisir la Cour de justice européenne.
L'article 228 du traité donne à la Commission le pouvoir d'ester contre un État membre qui ne se conforme pas à un arrêt précédent de la Cour. Il permet également à la Commission de demander à la Cour d'appliquer une sanction financière à l'État membre concerné.
Pour des statistiques actuelles sur les violations en général voir :
http://europa.eu.int/comm/secretariat_general/sgb/droit_com/index_en.htm#infractions
(1) Directive 92/43/CEE du Conseil concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages
(2) Directive 91/271/CEE du Conseil relative au traitement des eaux urbaines résiduaires