Mèze, mardi 29 juillet 2003
Le 3 juillet 2003, Monsieur Francis Idrac, Préfet de la Région Languedoc-Roussillon, annonçait qu'il déclasserait la Lagune de Thau en catégorie sanitaire B dès septembre 2003. Depuis, une rencontre en Préfecture a permis l'ouverture d'une concertation jusqu'à la mi-septembre 2003.
Le 25 juillet, loin des enjeux politiques et touristiques, les conchyliculteurs et pêcheurs de la Lagune de Thau ont exprimé leurs craintes tant en matière d'emplois et de sécurité alimentaire qu'en matière de préservation d'un site naturel exceptionnel dont ils sont les premiers gardiens.
Le soir même de la conférence de presse, Monsieur Jacques Blanc, Président du Conseil Régional LR, demandait à Monsieur le Préfet de "reporter" sa décision...
2 méthodes de calculs pour des résultats différents
Classée en catégorie sanitaire A depuis 1995, la Lagune de Thau, "site de 1er ordre pour l'élevage conchylicole" (extrait du bilan Réseau de Suivi Lagunaire/IFREMER - avril 2003), est l'objet de suivis réguliers de la part des services de l'IFREMER.
- Basant ses calculs sur un document de prescription émanant du Laboratoire de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire de l'IFREMER et imposant la prise en compte des prélèvements sur 3 ans, l'IFREMER annonce 86,7 % de résultats conformes à la norme exigée
- La Section Régionale de Conchyliculture en Méditerranée (SRCM), de son côté, base ses calculs sur les 26 mois d'analyses régulières de l'IFREMER comme le prévoit l'arrêté du 21 mai 1999 relatif au classement de salubrité et à la surveillance des zones de production et de reparcage des coquillages vivants. Cette période de 26 mois permet de prendre en compte les acquis obtenus dans le cadre du 2ème Contrat de Baie qui n'a débuté qu'en 1998 pour s'achever en 2002. Remonter jusqu'à l'année 1997, comme le fait le Préfet, revient à nier l'efficacité des tout derniers investissements réalisés au titre des 2 Contrats de Baie (74 millions d'euros / 1990-2002).
Selon la méthode de calculs basée sur l'arrêté ministériel (avril 2001 - mai 2003), la SRCM trouve comme résultat 91,9 % de valeurs inférieures à 230 Ecoli et 4 points au-dessus de 1000 Ecoli (tous situés au point 10) . Ces résultats supérieurs à 1000 Ecoli
proviennent du point 10 considéré par la SRCM et la Prud'homie comme non représentatif de la "qualité de la zone" selon l'arrêt ministériel de mai 1999. Le Préfet a d'ailleurs reconnu par le passé le caractère atypique du point 10 (arrêté préfectoral du 6/04/99).
Un point litigieux : le point 10 !
Excentré à l'extrémité ouest-large de la lagune, ce point 10 est alimenté par une résurgence d'eau douce très localisée et légèrement
polluée ne concernant que 16 tables conchylicoles. Des fuites de station d'épuration ou de lagunage, loin en amont de cette résurgence, pourraient expliquer ce phénomène (selon l'étude du BRGM rendue en octobre 2000).
Pourquoi les hypothèses soulevées par l'étude du BRGM n'ont-elles pas été suivies des recherches empiriques nécessaires ?
Raison invoquée : "Ces recherches coûtaient cher, mieux valait traiter la station d'épuration en amont". Malgré les 38 millions d'euros investis dans la Lagune au titre du 2ème Contrat de Baie et malgré l'importance cruciale de ce point de référence dans les résultats IFREMER, force est de constater que la pollution émanant du point 10 n'a pas été traitée comme elle aurait dû l'être malgré une nette amélioration. D'après Monsieur Sauvagnargues de l'IFREMER, "certaines investigations auraient pu être menées dans le cadre du 2ème Contrat de Baie".
Face à l'absence de solutions efficaces, les conchyliculteurs envisagent des alternatives radicales tel que le zonage particulier déjà pratiqué ou l'arrachage des tables.
75 % des fermetures de la Lagune de Thau sont dus à des crises phytoplanctoniques !
Depuis 1998,
3 arrêts de commercialisation sur 4 concernent des problèmes de planctons toxiques contre lesquels la purification des coquillages imposée par un déclassement en B ne peut rien. Les arguments tendant à affirmer qu'il n'y aurait plus de crises conchylicoles, que l'image des produits et leurs prix seraient valorisés ne sont donc pas valables.
Bien au contraire,
ce déclassement officialiserait les retrempages de coquillages provenant d'autres bassins classés en B, emmenant avec eux algues nouvelles et parasites. Autant dire que les efforts passés et à venir pour préserver le milieu seraient anéantis !
Un milieu naturel sain, le meilleur garant de la sécurité alimentaire
L'argument "sécurité alimentaire", brandi de façon précipitée par certains acteurs locaux, a bon dos ! Chacun sait que la purification imposée par un déclassement en B ne résoudrait pas les problèmes viraux à l'origine de la plupart des intoxications. L'unique solution efficace est de ne pas apporter de virus dans les milieux de production.
Les exigences des normes sanitaires du classement en A, avec 90 % des résultats en dessous de 230 Ecoli, constituent la meilleure garantie de sécurité du consommateur.
En définitive, le déclassement en B, avec 90 % des résultats en dessous de 4 600 Ecoli, polluerait le milieu 20 fois plus qu'aujourd'hui, ce qui n'irait absolument pas dans le sens de la sécurité du consommateur.
Pour Monsieur Sauvagnargues (IFREMER), "le plus gros des travaux est fait, et si on arrête la vigilance, c'est la catastrophe qui attend les professionnels. On connaît les remèdes en microbiologie, ce n'est pas le moment de mollir".
Par ailleurs, les observations faites dans les pays qui ont choisi l'option de la pollution du milieu, suivie d'une purification des produits en bassins équipés d'UV, montrent que les incidents sanitaires y sont bien plus nombreux qu'en France, pays qui a toujours opté pour la défense de la qualité des milieux d'élevage.
Fini l'élevage, vive le commerce en gros ?
Un déclassement en B serait la porte ouverte à toutes les dérives et notamment à l'importation de produits étrangers qui
pénaliserait la production locale. Le passage systématique en bassin rendrait difficile la vente au jour le jour qui permet, aujourd'hui, à la conchyliculture familiale et aux petites exploitations de vivre. Ainsi, 200 à 300 petites disparaîtraient rapidement sans compter les emplois induits.
Quant au Schéma des Structures, qui réglemente les pratiques de production et les conditions de réimmersion des coquillages adultes,
il serait invalidé par un déclassement en B, selon l'arrêté ministériel de mai 99 qui fait force de loi et permet ces retrempages venant de bassins B.
L'exceptionnelle qualité du milieu et le retour de "l'arselière"
D'année en année, la qualité du milieu s'améliore de façon indéniable.
L'absence de malaïgue dans la Lagune de Thau malgré la forte canicule de ces deux derniers mois est une preuve irréfutable de la bonne qualité du milieu. Le témoignage du Prud'homme Major de la Prud'homie de Thau, Prud'homie majoritaire en nombre de pêcheurs en Languedoc-Roussillon, confirme une grande biodiversité lagunaire.
"Depuis le début de l'année, une trentaine de pêcheurs travaillent à l'arselière (clovissière). Ce petit métier avait disparu depuis 10 ans ! L'escargot de mer, l'huître plate et la pichiline reviennent aussi. L'oursin se porte très bien malgré une pêche importante. La présence d'une espèce comme l'hippocampe ne trompe pas sur la qualité du milieu. Pareil pour les herbiers de zostères et de posidonies, plutôt clairsemés en 1999, ils sont devenus très denses grâce à une eau claire qui laisse filtrer le soleil."
Le nombre de 296 pêcheurs professionnels sur la Lagune pour 506 sur toutes les autres lagunes du Languedoc-Roussillon prouve la richesse du milieu : 5 860 tonnes (CA : 9 millions 500 000 euros) de poissons, crevettes et coquillages pour 8370 tonnes au total dans la région (CA : 14 ME). Par contre, sur la Lagune de Leucate classée en catégorie B, il ne reste que 20 pêcheurs. Ce denier chiffre illustre bien ce qui arrive lorsque l'on relâche les efforts.
Le déclassement en B, annonciateur de projets urbains et touristiques ? Le SMVM veille...
Quelles sont donc les véritables raisons du déclassement de la Lagune de Thau ? Ce sujet semble dépasser les seuls secteurs de la conchyliculture et de la pêche pour devenir un enjeu national qui oppose préservation de l'environnement et bétonnage du littoral. L'article paru dans le Monde, daté du 10 juillet 2003 en page 11, sur le rapport du Conseil National d'Aménagement et de Développement du Territoire lève toutes ambiguïtés sur la question. De la même façon, la réduction de 30 % des crédits 2003 de l'IFREMER contredit le voeu pieux du bien disant "développement durable".
Nombreux sont les projets d'urbanisation et de tourisme autour de la Lagune de Thau. Il n'est que de lire les
Actes des Assises du Bassin de Thau, document élaboré par l'ex-Association de Développement et d'Aménagement présidé par Jacques Adge (Maire de Poussan) pour s'en rendre compte :
"Songez que sur la seule aire urbaine de Sète-Balaruc-Frontignan, d'ici à 2010, l'enjeu n'est pas moins d'accueillir 2500 nouveaux habitants, de créer plus de 1000 emplois, de construire plus de 3500 résidences et d'urbaniser quelques 250 hectares."
Heureusement, les conchyliculteurs et pêcheurs
bénéficient d'un Schéma de Mise en Valeur de la Mer (SMVM), unique en France et signé en 1995, qui garantit la priorité des activités de pêche et de cultures marines sur les autres usages maritimes et terrestres du Bassin de Thau... Ce contrat ne peut être remis en cause que par décret ministériel.
Propositions des organisations professionnelles
Dans le cadre du 3ème Contrat de Baie actuellement en discussion
pour la pérennité de la qualité des eaux de Thau et leur classement en A
Aujourd'hui, la SRCM et la Prud'homie de Thau travaillent sur le dossier qu'ils doivent déposer en Préfecture à la mi-septembre pour défendre le maintien du classement sanitaire A de la Lagune de Thau.
Une expertise des analyses de l'Ifremer sera très prochainement confiée à un institut indépendant du type CNRS ou autre organisme reconnu compétent afin que celui-ci se penche sur les résultats sanitaires Ifremer, sa méthode de calculs et les conclusions à en tirer.
Professionnels responsables, les conchyliculteurs et pêcheurs de la Lagune de Thau souhaitent poursuivre dans la voie de l'excellence écologique grâce :
- au traitement des eaux pluviales afin d'améliorer la gestion des perturbations climatiques,
- au règlement de la pollution du point 10 en développant une étude de zone et en renforçant les contrôles autour de ce point pour décider de mesures administratives adaptées,
- au développement accéléré des installations de purification et de finition dans les établissements conchylicoles afin de faire face aux aléas climatiques,
- à une gestion plus stricte des importations et une limitation du nombre de cordes par table grâce à la signature du Schéma des Structures, obligatoire pour toute zone de production conchylicole, en souffrance depuis 1 an en Préfecture,
- à la mise en place d'une Charte de Qualité par les conchyliculteurs et pêcheurs.
Vos Contacts presse :
Monsieur Jean-Claude Archimbeau, Président de la SRCM : 04 67 78 30 94 - 06 80 10 27 10
Monsieur Yves Delagarrigue, 1er Vice-Président de la SRCM - 04 67 43 82 41 - 06 20 69 50 71
Monsieur Philippe ORTIN, 2ème Vice-Président de la SRCM - 04 67 01 72 13 - 06 98 94 38 90
Monsieur Denis Moreno, Prud'homme Major PRUD'HOMIE DE THAU : 04 67 77 25 90
Françoise Boissy, attachée de presse - O'Sources RP : 06 15 74 76 20 - 04 67 02 89 52
Dossier de Presse complet sur la conchyliculture en Méditerranée sur demande
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