Horizon 2015 : réduction de moitié du nombre de
personnes n'ayant pas accès à l'eau potable ou n'ayant
pas les moyens de s'en procurer
En septembre 2000, la Déclaration du Millénaire était
adoptée à l'unanimité. Les Etats membres de
l'ONU se fixaient ainsi pour objectif ambitieux de réduire
de moitié à horizon 2015, le nombre de personnes n'ayant
pas accès à l'eau potable ou n'ayant pas les moyens
de s'en procurer.
En septembre dernier, le Sommet Mondial du Développement
durable de Johannesburg a repris cet objectif en l'élargissant
au domaine de l'assainissement. Il s'agit en l'occurrence de la
seule avancée diplomatique de cette manifestation et mérite
à ce titre d'être soulignée.
L'objectif posé, les engagements pris, tout reste à
faire. Le défi est immense : plus d'un milliard d'individus
dans le monde n'ont pas accès à l'eau potable et plus
de 2 milliards ne disposent pas d'installations sanitaires.
Les enjeux sont connus. Ils concernent tout d'abord la santé
avec plus de 5 millions de personnes qui décèdent
chaque année de maladies liées à l'eau, faute
d'eau potable et d'assainissement. Ils constituent également
une des premières préoccupations environnementales
avec une croissance des prélèvements en eau et une
augmentation continue des pollutions, qui mettent en grave danger
l'avenir immédiat de la ressource. Ce sont enfin des enjeux
sociaux et économiques. Les conditions d'accès à
l'eau et à l'assainissement sont des facteurs d'injustice,
d'inégalité de développement et des sources
de conflits entre les populations.
Quant au défi financier à relever, il reste entier.
Les investissements nécessaires pour atteindre les objectifs
de Johannesburg sont colossaux et supposent de drainer une masse
importante de capitaux dans des infrastructures.
Une gestion mondiale rigoureuse de l'eau et de l'assainissement
L'eau ignore les frontières. Elle connaît la géographie
physique et fait fi de la géographie politique. Il convient
désormais d'envisager une gestion mondiale rigoureuse de
l'eau et de l'assainissement qui permette d'appréhender le
cycle de l'eau dans son ensemble. On ne peut plus aujourd'hui envisager
une gestion intelligente de la ressource en eau sans envisager dans
le même temps son assainissement, dans une démarche
intégrée. Cette nécessité plaide pour
une approche par bassins hydrographiques, où la logique hydrogéographique
s'impose sur la logique administrative.
Si elle reste encore à améliorer, l'expérience
française d'une gestion par bassin est un succès.
La création d'agences de bassin ayant compétence sur
l'eau et l'assainissement a permis de mieux gérer la ressource,
de mener des actions de lutte contre les pollutions, de traiter
de mieux en mieux les rejets, de financer, aux côtés
des communes, les investissements nécessaires et d'arbitrer
en partie les conflits entre les différents utilisateurs.
Promue par l'Union européenne, la généralisation
du district hydrographique s'inscrit dans l'objectif assigné
d'atteindre le bon état écologique de la ressource
et de garantir à terme de pouvoir disposer d'une ressource
essentielle pour les citoyens européens.
Bon nombre de pays ont compris l'intérêt et les enjeux
d'une telle démarche. Le gouvernement du Canada, pays riche
en ressources hydriques, vient d'annoncer un soutien technique et
financier à la mise en place d'une gestion intégrée
par bassin versant de trente-trois cours d'eau prioritaires touchant
l'ensemble du Québec. D'autres persistent dans une gestion
anarchique à court terme avec des effets désastreux
et irréversibles, comme en Californie.
Devant la gravité des enjeux sociaux et environnementaux,
la dispersion des responsabilités entre les différents
organismes internationaux, tant en matière de financement,
de gestion de projets ou d'analyse, n'est plus acceptable aujourd'hui.
Si la gestion intégrée de l'eau est fondamentale sur
le terrain, elle l'est tout autant au niveau international.
Vers un outil international de la gestion de l'eau
C'est pourquoi il est urgent de créer une agence internationale
de l'eau, sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies,
relayée par des antennes régionales. Les missions de
cette agence seront multiples. Elle devra contribuer à prévenir
les conflits d'usage avec la légitimité des Nations
Unies, organiser les financements nécessaires aux investissements
dans les domaines de l'eau et de l'assainissement, assurer une péréquation
permettant aux plus pauvres de financer leurs infrastructures, agir
contre les pollutions, engager des actions de prévention, conseiller
les Etats et les pouvoirs locaux, et constituer un observatoire de
la ressource et de sa gestion.
Sans outil international porté par une réelle volonté
politique et doté de moyens conséquents, sans mobilisation
internationale forte et coordonnée, les plus belles déclarations
resteront lettre morte.
Le Forum de Kyoto, troisième forum mondial de l'eau, qui
se tiendra du 16 au 23 mars prochain, s'inscrit dans le cadre de
l'année mondiale de l'eau douce consacrée par le Secrétariat
général de l'ONU. Etape nécessaire pour la
mise en uvre des résolutions de Johannesbourg, il constituera
un test de l'engagement des Etats à prendre les décisions
qui s'imposent afin que ces résolutions ne restent pas dans
l'histoire comme une énième déclaration de
bonne conscience, sans suite.
A l'heure où des sommes colossales sont dépensées
pour faire la guerre, le véritable courage politique aujourd'hui
est de s'attaquer aux problèmes qui conditionnent l'avenir
de la planète. L'eau en est un majeur.
Anne Le Strat
Conseillère de Paris
Présidente de la Société Anonyme de Gestion des Eaux de Paris
Maurice Ouzoulias
Conseiller Général du Val de Marne
Président du Syndicat Interdépartemental pour l'Assainissement de
l'Agglomération Parisienne
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