10 juillet 2002 Commission économique et monétaire
Président : Christa RANDZIO-PLATH (PSE, D)
La commission des affaires économiques a organisé une audition publique ce 10 juillet sur les règles de surveillance prudentielle dans l'Union européenne.
Auteur de la première contribution à cette audition, M. Karel LANNOO du Centre pour les études politiques européennes (CEPE) a attiré l'attention sur les situations financières différentes que connaissent l'Europe et les Etats-Unis, dans le sens où les contrôles visent le secteur bancaire plutôt que les marchés et eu égard au fait que le marché européen des valeurs et actions est beaucoup plus étroit que le marché américain. De manière générale, il a le sentiment qu'en Europe, la surveillance fonctionne très bien et il ne lui semble pas nécessaire de retirer ce rôle au secteur privé pour le confier à l'Etat à la suite des faillites qui viennent de se produire aux Etats-Unis. L'accent est mis sur la protection des investisseurs, mais il a reconnu qu'on ne peut exclure tout risque. Certes, le système européen est fragmenté puisque tous les pays ne suivent pas la ligne préconisée par le Royaume-Uni en faveur d'une autorité unique, en l'occurrence l'Autorité des services financiers (Financial services Authority, FSA), mais il ne voit aucune nécessité d'imposer un nouvel arsenal réglementaire. L'important, c'est que les différentes autorités européennes coopèrent étroitement sur la base d'un niveau minimal d'harmonisation et avec une structure bien définie rendant compte aux ministres de l'UE siégeant à l'ECOFIN et au PE. Reste un problème à résoudre, celui du rôle à conférer à la Banque centrale européenne en matière de surveillance, une question soulevée par plusieurs autres intervenants.
Le président de la Commissao do Mercado de Valores Mobiliarios (CMVM), M. Fernando TEIXEIRA DOS SANTOS, est d'avis qu'après la crise Enron, il est indispensable d'actualiser le droit des sociétés dans l'UE, particulièrement en ce qui concerne la définition des avoirs et des responsabilités afin d'assurer une meilleure protection du consommateur. Pour lui, une plus grande transparence s'impose pour ce qui concerne les sociétés de holding. Abordant le problème d'Enron proprement dit, il y voit un cas évident de fraude et estime par conséquent que les agences de cotation ne sont pas à mettre en cause, même s'il reconnaît la nécessité de clarifier les choses en matière de communication d'informations sensibles aux agences de cotation afin de se prémunir contre les risques d'abus de position sur le marché. De plus, il estime que l'auto-régulation n'est pas suffisante et qu'il convient également de se pencher sur le rôle des réviseurs pour rassurer les marchés.
Pour M. Henk BROUWER, directeur général de la Nederlandsche Bank (DNB), la conclusion à tirer du cas Enron, c'est qu'une coopération beaucoup plus étroite entre les autorités de surveillance s'impose au niveau européen. De manière générale, il est de ceux qui ont le sentiment que les structures en place en Europe donnent globalement satisfaction, avec une exception possible dans le domaine de la réassurance. Il appelle de ses voeux une approche plus internationale de la réglementation et de la surveillance par le biais de la coopération avec les Etats-Unis et les autres pays au sein du Comité de Bâle. Selon lui, les banques centrales doivent être associées à la surveillance prudentielle et il s'agit, au niveau européen, de veiller au respect de la subsidiarité, les tâches de régulation et de surveillance devant être effectuées dans un cadre national.
A son tour, Sir Howard DAVIES, président de la FSA britannique, a fait part de l'expérience positive accumulée par cet organe créé en 1998. Le FMI publiera l'an prochain une étude qui y sera consacrée. Les avantages présentés par une autorité unique de surveillance, telle que la FSA, comprennent notamment l'efficacité, la souplesse et la possibilité de concentrer le moment venu, des ressources sur des secteurs spécifiques comme l'assurance, par exemple. Il a reconnu qu'une lacune doit être comblée dans le domaine de la réassurance. La FSA a des réunions régulières avec des fonctionnaires du Trésor et de la banque d'Angleterre où sont examinées les menaces potentielles planant sur les marchés. Pour lui, la Banque centrale ne devrait pas être associée sur une base quotidienne à l'exercice de surveillance. Par ailleurs, une autorité unique facilite également la coopération avec d'autres organismes européens, mais il hésite à recommander ce modèle pour les autres pays. Tout dépend, en fait, de la nature du système financier de chaque Etat membre. A l'instar de la plupart des intervenants, il estime prématuré d'envisager la mise en place d'une autorité européenne unique, mais insiste en revanche sur la nécessité de construire une structure européenne basée sur une étroite coopération.
Abordant le sujet de la surveillance du secteur de l'assurance en France, Mme Florence LUSTMAN, secrétaire générale de la Commission de contrôle des assurances (CCA), a expliqué que le but était d'exercer un contrôle a posteriori plutôt que d'interférer préalablement à l'approbation de contrats. L'économie a dû faire face à des problèmes particuliers à la suite des tempêtes de 1999 et des événements du 11 septembre dernier. Dans ce sens, il importe de veiller à l'existence d'avoirs suffisants pour couvrir les responsabilités et tel est l'objectif de la surveillance de ce secteur en France. Elle a également souligné qu'une approche flexible était nécessaire, au même titre que la coopération, pour s'attaquer à des problèmes tels que le blanchiment d'argent et le terrorisme.
M. Edgar MEISTER, membre du Comité directeur de la Deutsche Bundesbank, a fait observer que la situation en Europe avait changé, caractérisée par des risques accrus depuis l'introduction de l'Euro et de nouveaux types d'investissements transfrontaliers. L'objectif que doivent poursuivre les autorités de surveillance est d'assurer la stabilité du système financier et lui aussi a souligné la nécessité d'une étroite coopération au niveau européen, préférable à la mise en place de nouvelles structures. Mais, il importe pour lui d'y associer les banques centrales, même s'il n'est pas nécessaire, pour ce faire, de modifier la législation actuelle inscrite dans le Traité de Maastricht. Il est convaincu que le Comité de Bâle a un rôle central dans la mise en place de règles acceptables en matière d'adéquation des capitaux.
Pour M. Tommaso PADOA-SCHIOPPA, membre du Directoire de la Banque centrale européenne (BCE), il convient que les autorités de surveillance se penchent, entre autres problèmes, sur l'opportunité de créer une agence unique, sur le rôle des banques centrales et les relations entre les autorités nationales. La nouvelle législation adoptée dans le domaine des services financiers devrait être valable pour une période de dix ans. Mais il importe, selon lui, de noter que le modèle européen fonctionne dans un environnement sans précédent dans lequel la législation financière serait arrêtée au niveau européen tandis que le contrôle de son application relèverait de la compétence nationale. Il est d'autant plus important de veiller à une coopération transfrontalière plus étroite et à une application effective des règles. A son avis, il faut également faire preuve de souplesse dans la mise en oeuvre des procédures Lamfalussy, particulièrement en ce qui concerne la législation primaire et secondaire.
Mme Ieke van den BURG (PSE, NL) élaborera le rapport de la commission économique sur ce sujet.
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