Il est
sans doute paradoxal que ce soit en cette année mondiale
de l'eau douce qu'un tel événement ait marqué
nos pays riches alors même que les instances internationales
se penchaient sur la situation désastreuse d'une
part importante de l'humanité pour l'accès
à cette ressource vitale, ainsi que pour le traitement
des eaux usées.
Ces
circonstances fortuites ne seront probablement pas sans
interférences avec le débat national sur la
politique de l'eau que le Gouvernement a voulu lancer il
y a environ un an. Il est en effet patent que les enjeux
en matière de gestion de l'eau sont universels et,
qu'à l'intensité près, en fonction
des inégalités naturelles ou culturelles,
les problématiques sont très proches. La France
s'est exprimée haut et fort tant à Johannesbourg
qu'à Kyoto ou à Evian sur ces sujets. Elle
se doit donc d'être exemplaire sur son propre territoire.
La mise
en application de la directive-cadre européenne sur
l'eau nous en donne l'occasion et la chance. J'ai souhaité
que ce défi de la qualité de l'ensemble de
nos eaux, douces et côtières, de surface et
souterraines, d'ici 2015, nous oblige à un temps
de réflexion et de débat avant de prendre
les dispositions qui feront que nous atteindrons ou non
ces objectifs.
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L'organisation
du débat : 1ère et 2ème phases
Ce débat
je l'ai voulu en 3 temps, et dénué de tout
a priori, qui aurait pu en fausser le déroulement.
Les deux grandes lois, celle de 1964 et celle de 1992, qui
régissent notre politique de l'eau, n'ont-elles pas
été fondées sur un large consensus
? La gestion de ce bien commun ne légitime-t-elle
pas une large implication de tous les acteurs, d'autant
plus que leurs intérêts pourraient parfois
paraître éloignés, voire contradictoires
?
Les
bassins hydrographiques, unités territoriales fonctionnelles,
ont été relégitimés sur le plan
européen.
Après
une première phase de rencontres bilatérales
entre mes collaborateurs et les représentants nationaux
des principales organisations concernées (collectivités,
professionnels, usagers, associations) j'avais donc décidé
de m'appuyer très largement sur les institutions
de bassin pour développer la deuxième phase,
décentralisée, du débat. Celle-ci s'est
achevée en juillet dernier par des réunions
élargies des Comités de bassin, qui m'ont
permis d'assister à toutes les restitutions des travaux
conduits jusqu'au niveau des Commissions géographiques.
Vous
en trouverez une synthèse résumée dans
le dossier de presse qui vous est destiné, mais,
si vous le souhaitez, un rapport technique plus complet
(65 pages) est disponible sur le site internet du ministère.
Ce travail est le fruit de plus de 50 réunions locales
et de la mobilisation de plus de 5 000 acteurs. Je puis
témoigner de la qualité des interventions
et de la sérénité qui a présidé
aux travaux.
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Consultation
du grand public : 3ème phase
Nous
en arrivons donc aujourd'hui au lancement de la 3ème
phase du débat, c'est à dire l'information
et la consultation des citoyens eux-mêmes. Cela me
tenait d'autant plus à cœur que la participation
du grand public est conforme à l'esprit de la directive-cadre
européenne, et à la convention d'Aarhus ;
l'eau est le bien commun de tous les français, toutes
les actions sont faites pour eux et financées par
eux : il est donc parfaitement légitime qu'ils puissent
exprimer leurs attentes et que les experts s'attachent à
leur expliquer les enjeux, les solutions possibles et leur
impact. Ce type de démarche avait déjà
été utilisée pour la construction de
la Charte de l'Environnement.
Je me
suis donc rapprochée de la Commission nationale du
débat public pour concevoir le mode de consultation.
C'est ainsi que divers canaux seront utilisés, l'ensemble
étant coordonné par un Comité de pilotage,
expression des bassins, des divers usagers, et de la CNDP
elle-même :
- la
brochure de synthèse des premières phases
du débat et un questionnaire seront diffusés
par l'intermédiaire du support internet mais aussi
par une large diffusion papier (100 000 exemplaires) par
le biais des revues des agences de l'eau : seront ainsi
destinataires les associations, les services de l'eau et
de l'assainissement, les élus locaux, les représentants
des acteurs économiques, à charge pour eux
de relayer l'information auprès de leurs mandants
ou usagers.
- le
questionnaire sert également de base à un
sondage auprès d'un échantillon représentatif
de 3 000 personnes (en cours de réalisation).
- des
réunions de panels d'usagers permettront de mieux
comprendre les réponses spontanées au questionnaire.
- une
conférence de citoyens, les 22 et 23 novembre portera
enfin sur la question du devenir des boues de stations d'épuration,
et notamment leur utilisation en agronomie, thème
largement ressorti des débats dans les bassins et
interférant avec la question du débouché
de nos déchets.
J'ai
conscience de la relative complexité des choses de
l'eau : les services de la direction de l'eau, avec l'aide
d'un consultant ont cependant cherché à appréhender
la perception que peut avoir le grand public non seulement
de la question de l'eau potable (sur laquelle de nombreux
sondages existent) mais plus largement des milieux aquatiques.
Le rôle
des média est considérable dans la sensibilisation
des citoyens à ces questions trop souvent traitées
par le sensationnel. Je vous invite donc à répercuter
auprès de vos lecteurs ou auditeurs, ces informations
et, sinon le questionnaire lui-même, du moins le lieu
où le trouver, en les incitant à y répondre.
Peut être également pouvez-vous organiser des
débats sur vos propres colonnes ou antennes, afin
de faire remonter toutes suggestions concernant l'amélioration
de l'état et de l'utilisation de nos ressources en
eau.
Synthèse
et propositions
Si le
débat est nécessaire, il doit déboucher
sur des conclusions. Celles-ci seront tirées lors
d'un colloque national de clôture qui se tiendra le
16 décembre au CNIT. Vous serez bien évidemment
invités.
La synthèse
y sera faite de l'ensemble des contributions des experts,
des élus et du grand public et je présenterai
les grandes orientations du projet que je proposerai au
Gouvernement. Ces grandes orientations feront d'ailleurs
l'objet d'un ultime échange tant avec les Comités
de bassin qu'avec le grand public lui-même que, je
compte consulter par les mêmes canaux, selon la suggestion
du Comité de pilotage.
Ainsi
la stratégie et le plan d'action du Gouvernement
pourront-ils largement intégrer les avis de nos concitoyens.
En particulier un projet de loi devrait être approuvé
en Conseil des Ministres à la fin du premier semestre
2004.
Je vous
remercie de l'intérêt que vous avez témoigné
pour ce sujet ainsi que de votre contribution à la
mobilisation des français sur cet important sujet,
qui pourrait devenir encore plus prégnant à
l'avenir, en fonction des conséquences des changements
climatiques en cours.