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FRANCE communiqué de presse du Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnementParis, le 22 octobre 1999 L'effacement de barrages en France
De nombreux cours d'eau français ont été aménagés depuis des siècles pour les besoins des hommes en énergie, navigation et agriculture notamment. Des impacts parfois
importants sur les écosystèmes aquatiques en sont nés. Le barrage fait obstacle aux
migrations des organismes biologiques et en premier lieu des poissons. En outre, ce type
d'ouvrage modifie les caractéristiques morphodynamiques et hydrauliques des rivières
(ralentissement du courant, réchauffement de l'eau, envasement, eutrophisation).
En France, trois barrages de 6 à 15 m de
hauteur ont été récemment démolis sur des cours d'eau à poissons migrateurs afin de
restaurer la qualité écologique de ces cours d'eau. Il s'agit des barrages de
Kernansquillec sur le Léguer (Côtes-d'Armor), St- Etienne du Vigan sur l'Allier
(Haute-Loire), Maisons-Rouges sur la Vienne (Indre-et-Loire).
Contexte juridique
La loi du 16 octobre 1919 sur l'utilisation
de l'énergie hydraulique prévoit que les concessions ou autorisations d'utiliser
l'énergie hydraulique sont accordées pour une durée limitée, ne pouvant excéder
soixante-quinze ans. Elles peuvent être renouvelées et ce renouvellement donne
l'occasion de réaliser un bilan entre les avantages socio-économiques liés au maintien
de l'ouvrage (énergie, multi-usages, alimentation en eau potable, tourisme, etc.), et les
impacts sur lenvironnement. En fonction de ce bilan, l'autorité administrative
décide de renouveler l'autorisation ou la concession, ou, au contraire, d'y mettre un
terme et d'ordonner une remise en état des lieux.
Les concessions concernent les ouvrages de
plus de 4 500 kW (concessions de service public en droit français). En fin de
concession les biens sont remis à l'Etat. Celui-ci décide à l'échéance de la
concession, soit de renouveler le titre, soit d'affecter la retenue d'eau à d'autres
usages, soit, le cas échéant, de démolir le barrage (aux frais de l'Etat).
Les autorisations s'appliquent aux ouvrages
de moins de 4 500 kW. Au terme de l'autorisation, les ouvrages restent dans tous
les cas la propriété du pétitionnaire. Si l'autorisation n'est pas renouvelée, la loi
du 16 octobre 1919 (art. 16 - 6ème alinéa) impose au propriétaire de
rétablir le libre écoulement du cours d'eau à ses frais.
Les autorisations délivrées antérieurement
ont été maintenues pendant une période provisoire de 75 ans, soit jusqu'au 16 octobre
1994. Sur plus d'une centaine de dossiers de renouvellement de concessions ou
d'autorisations, l'Etat en a refusé trois. Les barrages ont alors été démolis. En
effet, les faibles intérêts économiques constatés de ces ouvrages et leurs impacts sur
lenvironnement ne justifiaient plus leur maintien.
Réversibilité des aménagements
Cette limitation dans la durée des
autorisations, avec obligation de remise en état des lieux si l'autorisation n'est pas
renouvelée, permet de mettre en oeuvre le principe de réversibilité des aménagements,
si les inconvénients de l'ouvrage ont été sous-estimés par rapport aux avantages.
Ce principe de réversibilité des
aménagements a ainsi été mis en oeuvre en France notamment dans le cadre plan
"Loire Grandeur Nature", adopté par le Gouvernement français le 3 janvier
1994. Ce plan d'ensemble pour la Loire a pour objectif de protéger les populations et de
prévenir les inondations, tout en préservant les habitats et les milieux aquatiques,
notamment le caractère "sauvage" de la Loire et de ses affluents. Dans ce
cadre, un objectif important a été la sauvegarde des poissons migrateurs, dont le grand
saumon de la Loire, seul saumon parcourant encore un grand fleuve en Europe (800 km de
distance entre l'estuaire et les frayères).
Le Gouvernement a ainsi décidé que les
barrages anciens de St-Etienne du Vigan sur l'Allier et celui de Maisons-Rouges sur la
Vienne, dont les impacts n'étaient plus compensés par un intérêt économique suffisant
seraient effacés (voir ci-après). Il a par contre accepté le principe d'un certain
nombre d'aménagements, après en avoir soigneusement vérifié l'utilité et minimisé
les impacts par des mesures correctives et compensatoires appropriées. Il contribue ainsi
au "développement durable" de la Loire.
Toutefois, en matière de concession de
service public, ce principe de réversibilité mériterait d'être complété car
actuellement le concessionnaire tire les bénéfices de la concession, alors que la remise
en état des lieux incombe à l'Etat, à l'issue de la concession.
Kernansquillec sur le Léguer
(Côtes-d'Armor)
Contexte
Ce barrage d'environ 15 m de haut sur le
Léguer, en béton à voûtes multiples construit vers 1920, sous le régime de la
concession, alimentait une papeterie en électricité. La retenue (400 000 m3),
située à l'aval de zones agricoles, souffrait d'une forte eutrophisation des eaux et
d'un envasement très important de l'ordre de 50%. La dernière vidange de la retenue
effectuée lors de la visite décennale, réalisée en France tous les dix ans sauf
dérogation, s'était révélée catastrophique pour la faune aquatique, ensevelie sous la
vase. Lors de l'instruction de l'autorisation devant succéder à la concession,
l'administration a indiqué au concessionnaire sortant les conditions de l'octroi du
nouveau titre : notamment augmentation de la capacité des ouvrages évacuateurs de crue,
désenvasement de la retenue. L'ancien concessionnaire a préféré renoncer à sa demande
: les ouvrages ont été remis à l'Etat à la fin de la concession le 31 décembre 1993.
Lors des crues de janvier 1995, sept maisons
avaient dû être évacuées en aval sur la recommandation des experts, en raison de
l'insuffisance des ouvrages évacuateurs de crues, l'eau étant prête à déverser par
dessus le barrage. En outre, il fermait la rivière du Léguer à la circulation des
saumons et autres poissons migrateurs. Compte tenu de son intérêt énergétique limité,
de sa vétusté et des risques pour la sécurité publique et lenvironnement, l'Etat
a décidé de démolir l'ouvrage.
Maîtrise d'ouvrage
La maîtrise d'ouvrage a été assurée par l'Etat (ministère de l'Industrie). Le coût de 6,1 millions de francs a été
supporté par l'Etat avec une aide de l'agence de l'eau.
difficultés particulières
Les principales difficultés ont concerné la
vidange et les précautions à prendre en raison du fort envasement de la retenue et de la
présence d'une pisciculture et de captages d'eau potable à l'aval. La vidange du
barrage, autorisée par un arrêté préfectoral du 12 avril 1996, a été
précédée d'un hydrocurage, sur l'axe du lit mineur, de 95 000 m3 de boues,
avec traitement dans des lagunes de décantation afin de protéger la rivière en aval.
Elle s'est terminée sans atteinte notable à la qualité des eaux grâce aux précautions
prises.
Le permis de démolir a été accordé par le
préfet le 17 septembre 1996. Les travaux de démolition du barrage ont été achevés en
1996 sans difficulté particulière. Une opération de réhabilitation et de mise en
valeur de lensemble de la vallée, y compris une friche industrielle proche du
barrage, va être engagée maintenant par lassociation de sauvegarde du Léguer.
Contacts
Le suivi de l'opération au niveau technique
a été assuré par :
Direction Départementale de
lagriculture et de la forêt
des Côtes d'Armor (M. Marc BONENFANT)
1, rue du Parc- BP 2256 - 22022 St-BRIEUC Cedex
Tél 02.96.62.47.00 Fax 02.96.33.29.05
Une cassette vidéo (16 minutes) de la
démolition et de ses objectifs a été réalisée par l'association Eaux et Rivières de
Bretagne et est disponible (coût 60 francs + frais de port) à :
- Centre
d'initiation à la rivière (M. Vincent LEFEBVRE)
Tél 02 96 43 08 39 - Fax 02 96 43 07 29
St- Etienne du Vigan sur l'Allier
(Haute-Loire)
Contexte
La construction du barrage de St-Etienne du
Vigan par un particulier avait été autorisée en 1895 en vue de l'éclairage de la ville
de Langogne (Lozère). Haut d'environ 12 mètres de haut, sans dispositif de
franchissement pour les poissons migrateurs, le barrage avait stérilisé 30 hectares
d'excellentes frayères à saumons du Haut-Allier. A l'époque, les populations rurales
avaient vigoureusement protesté (vainement), la pêche leur fournissant un complément de
revenu appréciable.
La ville de Langogne a reconstruit le barrage
en béton, quelques mètres à l'aval du premier barrage partiellement ruiné. Le barrage
est devenu propriété d'EDF en 1950.
En application du plan "Loire Grandeur
Nature", adopté le 3 janvier 1994 par le Gouvernement français (cf. § 2
ci-dessus), le préfet n'a pas renouvelé l'autorisation de ce barrage à son expiration
le 16 octobre 1994. Il a demandé à EDF de démolir le barrage à ses frais pour
rétablir le libre écoulement du cours d'eau, en application de la loi de 1919.
Maîtrise d'ouvrage
La démolition a été assurée par EDF. Le
coût a été d'environ 7 millions francs pris en charge par EDF avec une aide de l'agence
de l'eau.
difficultés particulières
Le démarrage du chantier a été retardé
dans l'attente d'une petite crue de façon à éviter tout risque de pollution lors de la
vidange de la retenue. La démolition a été faite à l'aide d'explosifs le 24 juin 1998.
Les sédiments dans la retenue étaient d'excellente qualité (sables et graviers) et
aucune pollution n'a été constatée. Le site est revenu très rapidement dans un état
proche d'un état naturel et 5 frayères de saumons ont été observées dès l'hiver
1998-99 à l'amont du site.
Contacts
Des photos et des images vidéos sont
disponibles. Un document de présentation et un film vidéo de 6 mn ont même été
réalisés par EDF sur l'effacement du barrage.
EDF (M. MURA)
rue des cuirassiers 69402 LYON Cedex 03
Tél 04.78.71.44.77 Fax 04.78.71.35.97
DDE de la Haute Loire (M. ALEXIS)
rue MOULINS 43000 LE PUY EN VELAY
Tél 04 71 05 84 05 Fax 04 71 05 84 55
ERN / SOS LOIRE VIVANTE
8, rue Crozatier 43000 LE PUY EN VELAY
site internet : http://www.rivernet.org/stvig_f.htm
Maisons-Rouges sur la Vienne
(Indre-et-Loire)
Contexte
Construit en 1922 sous le régime de la
concession hydroélectrique, à 800 mètres à l'aval de la confluence de la Vienne et de
la Creuse, le barrage de Maisons-Rouges présente une dénivelée de 4 mètres environ (à
l'aval d'un bassin versant de près de 20 000 km2). Créé au départ
pour les besoins d'une papeterie, il a ensuite été intégré dans le patrimoine d'EDF.
La position de ce barrage, le premier depuis la mer, sa situation à une confluence de
grandes rivières ont entraîné un fort impact sur de nombreuses espèces de poissons
migrateurs. Notamment le saumon, qui souffrait déjà d'une réduction de l'accès à une
partie des frayères, a disparu. Les aloses se sont cantonnées sur une frayère
relictuelle à l'aval du barrage, avec des problèmes d'hybridation entre Grande Alose et
Alose feinte. Les diverses passes à poissons construites ont eu une efficacité très
faible, et les différents plans de réintroduction du Saumon sur la Gartempe, affluent de
la Vienne, n'ont pas eu de résultats probants.
Dans le cadre du plan "Loire Grandeur
Nature" adopté le 3 janvier 1994, le Gouvernement a décidé que la concession de ce
barrage ne serait pas renouvelée à son expiration le 31 décembre 1994 et que l'Etat,
devenant propriétaire du site à l'expiration de la concession, entreprendrait la
démolition de cet ouvrage, en raison de l'importance des impacts, non compensés par un
intérêt économique suffisant.
Maîtrise d'ouvrage
La maîtrise d'ouvrage a été assurée par
l'Etat (Ministère chargé de lenvironnement). L'opération a été conduite par la
direction départementale de l'Equipement d'Indre et Loire et la maîtrise d'oeuvre par
EDF. Le coût s'élève autour de 14 millions de francs. Il a été assuré par le
ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, avec des aides de
l'agence de l'eau et d'EDF.
difficultés particulières
La principale difficulté a été
l'opposition des élus locaux, en raison de pertes fiscales significatives pour plusieurs
communes rurales. Elle a conduit à engager un plan d'accompagnement économique, de même
importance financière que le coût de la démolition proprement dite. D'importantes aides
ont été accordées par l'Etat, l'agence de l'eau, EDF et les collectivités
territoriales pour des opérations de développement local.
La démolition a été réalisée pendant
l'été 1998, les difficultés techniques ayant bien été appréhendées par la maîtrise
d'oeuvre. Après isolement d'une première moitié du chantier par des batardeaux
permettant de conserver jusqu'à la fin août le plan d'eau nécessaire à l'irrigation
des terres agricoles, la démolition a consisté essentiellement en un découpage des
3 rideaux de palplanches au chalumeau et en la démolition à la pelleteuse du corps
du barrage. Un seuil noyé a été reconstitué en fond du lit de la rivière pour
éviter, d'une part, des érosions régressives, prévisibles en raison de l'existence
d'anciennes extractions massives de sable dans le lit de la Vienne et de la Loire, et
d'autre part pour limiter la migration des sédiments situés en amont de la retenue.
Les sédiments constitués de sable n'ont
posé aucun problème de qualité. De nombreux pompages agricoles qui existaient dans la
retenue ont été rétablis par l'Etat (le coût du rétablissement est intégré dans le
coût global de la démolition). Par contre, un camping, proche de la confluence 800 m à
l'amont du barrage, a subi un glissement de terrain et un des bâtiments présente
quelques fissures, sans doute en partie à cause de la modification des écoulements des
eaux souterraines liée à l'abaissement de 4 mètres du plan d'eau.
Les aloses ont rapidement bénéficié de
l'effacement du barrage : 433 aloses ont été capturées sur la Vienne à Chatellerault,
20 km à l'amont de Maisons-Rouges (91 dans la passe à poissons et 342 en pêche de
sauvetage ; elles ont toutes été relâchées, parmi elles, 156 à l'amont du
barrage) et 15 sur la Creuse à l'aval de Descartes, 12 km à l'amont de Maisons-Rouges.
Des frayères actives ont été observées sur la Vienne à Chatellerault et sur la Creuse
à l'Ilette. Des lamproies ont été observées sur la Vienne en aval du barrage de
Chatellerault. Une recolonisation conséquente par la lamproie a été constatée sur la
Creuse jusqu'à St-Gautier, sur la Gartempe jusqu'à Saulgé et sur l'Anglin jusqu'à
Concrenier. L'observation en juillet 1999 d'un saumon vivant, de 88 cm de long et d'un
poids de 4,8 kg, dans la Gartempe à Châteauponsac en Haute-Vienne est un signe
encourageant. Il navait pas été observé de saumon à ce niveau de la rivière
depuis les années 20, après la construction du barrage de Maisons-Rouges. Ce retour
symbolique du saumon, après celui des aloses et des lamproies constaté cet hiver,
confirme les effets bénéfiques de leffacement du barrage de Maisons Rouges pour
les poissons migrateurs.
L'université de Chinon assure le suivi. Les
premiers constats indiquent une importante reprise de la dynamique du lit, qui avait été
fixé par le barrage.
Contacts
Un film vidéo de 8 mn et une plaquette
photographique du chantier sont en cours d'édition.
DDE d'Indre-et-Loire (M. CARO) 61, av de Grammont 37041 TOURS Cedex
Tél 02.47.70.80.23 Fax 02.47.70.80.29
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