Le Premier ministre a demandé, en septembre 1997, à Dominique VOYNET, ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement, « de procéder, en liaison avec les ministres et secrétaires d 'Etat concernés, à une analyse critique de l'ensemble des modes de financement publics dans le domaine de l'eau ».
L'efficacité des instances de bassin, en place depuis plus de 30 ans, n'est plus à démontrer. Ce principe est d'ailleurs repris au niveau européen dans le projet de directive cadre ainsi qu'au plan mondial dans les conclusions de la Conférence internationale sur l'eau et le développement durable qui s'est tenue, à Paris, en mars 1998.
Deux récents rapports, l'un du Commissariat général du plan et l'autre de la Cour des comptes ont révélé des insuffisances dans la transparence du prix de l'eau et dans la représentativité des instances de bassin, mais aussi des lacunes dans l'application du principe pollueur-payeur et des carences dans l'application de la loi. Ils ont également montré la nécessité d'une évolution des instruments d'intervention publique dans le domaine de l'eau.
C'est pourquoi la réforme proposée en conseil des ministres du 20 mai 1998 s'articule autour des quatre grands axes suivants
I. Mieux associer le Parlement à la définition de la politique de l'eau
Le contrôle du Parlement sur les agences de l'eau sera renforcé par le vote d'une loi de programmation définissant leurs programmes d'intervention quinquennaux en dépenses comme en recettes. Cette disposition s'appliquera dès 2001, dans le cadre de l'approbation du Vlllème programme d'actions des agences.
Dans ce cadre, la redevance de pollution domestique sera réformée en vue d'une meilleure équité entre les redevables et d'une meilleure cohérence.
II. Améliorer la transparence du secteur de l'eau et de l'assainissement et renforcer le caractère démocratique du système des agences de l'eau
Soucieux de répondre aux attentes légitimes des élus et des associations de consommateurs sur une plus grande transparence, le gouvernement décide de créer un Haut Conseil du service public de l'eau et de l'assainissement placé auprès des ministres chargés de l'Environnement, de l'Economie et de la Consommation. Il aura des missions de veille, d'alerte et de conseil sur le fonctionnement de ces services publics, en particulier en ce qui concerne le prix de l'eau.
La concertation sera renforcée au sein du comité national de l'eau dont la composition sera élargie notamment aux parlementaires, aux associations nationales d'élus et au mouvement associatif.
Par ailleurs, la place des associations de consommateurs et de protection de la nature ainsi que celle des grandes villes sera renforcée dans les instances de bassin.
Enfin, les dispositifs mis en place par la charte solidarité-eau, qui garantissent l'accès à l'alimentation en eau potable aux personnes en difficulté, seront renforcés ; une tarification progressive de l'eau sera étudiée au bénéfice des très faibles consommations.
III. Elargir et mieux appliquer le principe général « pollueur-payeur »
L'application du principe pollueur-payeur, fondement de la politique de l'eau en France, sera étendu à la prévention des inondations. A cet effet, un dispositif dissuasif de taxation ou de redevance portant sur les aménagements pouvant aggraver les crues va être créé.
Le gouvernement fait une priorité de la maîtrise de l'impact des activités agricoles sur la ressource en eau. A ce titre, il incite les agriculteurs à se préoccuper davantage de la préservation et du renouvellement des ressources naturelles, en tenant compte du projet de loi d'orientation agricole et de la réforme de la politique agricole commune. Une meilleure application du principe pollueur-payeur à l'agriculture s'inscrit dans cette démarche et sera notamment renforcée pour l'irrigation et les élevages. La pertinence d'un régime d'écotaxe ou de redevance concernant les pollutions diffuses dues aux cultures sera étudiée.
IV. Améliorer l'efficacité de l'action publique dans le domaine de l'eau
L'efficacité de la police de l'eau sera améliorée par des mesures de clarification du rôle et de l'organisation des services déconcentrés de l'Etat et par le renforcement des moyens humains et financiers des services de police de l'eau grâce, notamment, à la participation financière des agences de l'eau. Les conditions d'exercice de la police de l'eau et des milieux aquatiques par les gardes-pêche du Conseil supérieur de la pêche seront améliorées.
Les actions d'intérêt commun des agences de l'eau et des autres établissements publics de l'Etat intervenant dans le domaine de l'eau seront mieux coordonnées dans le cadre d'un groupement d'intérêt public.
Enfin, les agences de l'eau participeront à l'effort national en faveur de l'emploi. En effet, le secteur économique de l'eau est générateur d'emplois et créateur de nouveaux métiers. A ce titre, 225 emplois seront créés pour susciter l'émergence de projets locaux susceptibles de permettre la création de 8000 emplois-jeunes et leur transformation en emplois durables.
Dominique VOYNET fait appel à la solidarité de tous les acteurs de l'eau pour conduire ce vaste chantier et permettre à la France de maintenir sa position mondiale dans ce secteur.