FRANCE : Conseil Supérieur de la Pêche
Date : mars 2002
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L'ÉTAT ÉCOLOGIQUE DES RIVIÈRES DE FRANCE
révélé par les poissons
Une rivière est un milieu naturel, ou écosystème, très complexe.
Le CSP a caractérisé l'état écologique des cours d'eaux français, en utilisant comme espèces indicatrices la truite commune (fario) pour les milieux salmonicoles (eaux fraîches courantes généralement de montagne ou proches des reliefs), le brochet pour les milieux cyprinicoles (rivières lentes de plaine), et l’ombre ou les cyprinidés d’eaux vives (barbeau, vandoise…) pour les milieux intermédiaires. Ces espèces sont exigeantes et présentes dans tous les milieux naturels en bon état.
En 2001, on constate que les cours d'eau en bon état représentent seulement 15 % de la surface du territoire, la plus grande partie étant perturbée (63%), et 22% sont dégradés.
Une rivière est un
milieu naturel, ou écosystème, très complexe. Les scientifiques considèrent
que les écosystèmes sont les combinaisons de facteurs les plus complexes que
l'homme ait cherché à comprendre. Bien souvent il n’en perçoit qu’une
petite part et intervient dans le sens de ses intérêts sans être capable de
mesurer tous les impacts de cette gestion sur les écosystème concernés
Ainsi les rivières (qui dans un pays de très ancienne occupation humaine ont
toutes été considérablement modifiées par l’action de l’homme) peuvent
être décrites par une grande quantité de paramètres : la température de
l'eau, la composition chimique, la hauteur d'eau, sa dynamique, la flore et la
faune des rives, de la nappe d’eau et des fond par exemple. Dans une rivière
en bon état, les valeurs de ces paramètres sont proches des conditions
naturelles, qui dépendent de la géologie, du relief, du climat et donc de la région
concernée.
Puisqu’on ne peut mesurer sérieusement que certains éléments de ces écosystèmes,
pour les cours d'eau l'accent a longtemps été mis sur la qualité
physico-chimique, qui est assez bien adaptée à la mise en évidence des
pollutions importantes sur les grands cours d'eau . Elle correspond de plus à
deux exigences majeures des sociétés humaines : disposer d’eau en
quantité suffisante pour l’alimentation, les usages domestiques, industriels
et agricoles ; faire en sorte que cette eau soit sans danger pour la santé.
Mais les études récentes confirment que cela ne suffit pas pour dire si une
rivière est en bon état écologique ou non : tout ce qui constitue le milieu
physique ou habitat comme les berges ou le lit , les petits affluents ou les
zones humides annexes contribuent pour une part essentielle au bon
fonctionnement des cours d'eau.
Les espèces de poissons qui vivent dans un cours d'eau, la quantité de
poissons dans chaque espèce, dépendent de ces conditions naturelles, car
chaque espèce ou groupe d'espèces a des besoins particuliers. D'autre part,
les poissons se situent au sommet de la pyramide alimentaire.
On peut donc considérer que les poissons résument très bien l'état écologique
global d'un cours d'eau : leur survie dépend du fait que leurs exigences
propres et celles de tous les êtres vivants des niveaux inférieurs sont
satisfaites. Dans un peuplement de poissons qui est composé de plusieurs espèces,
certaines espèces sont plus exigeantes sur la qualité du milieu, et peuvent être
considérée comme des espèces indicatrices. Une rivière en bon état est une
rivière dans laquelle on peut trouver les espèces de poissons indicatrices
dans la quantité et la diversité qu’autorisent les caractéristiques du
milieu naturel.
Si une activité humaine a modifié les conditions naturelles, l'impact sur
l'environnement aquatique sera révélé par une évolution défavorable de la
population de l'espèce indicatrice.
D’autres espèces appartenant au règne animal (oiseaux inféodés aux rivières,
mammifères aquatiques, reptiles ou amphibiens) voire au règne végétal
peuvent aussi être retenues comme indicateurs de l’état écologique et il
conviendra ultérieurement de le faire. Les espèces de poissons indicatrices présentent
l’avantage d’être très largement réparties sur l’ensemble du réseau
hydrographique ce qui n’est hélas plus le cas de la plupart des autres vertébrés.
C'est en appliquant ces
principes que le Conseil Supérieur de la Pêche a caractérisé l'état
écologique des cours d'eaux français, en utilisant comme espèces
indicatrices la truite commune (fario) pour les milieux salmonicoles (eaux
fraîches courantes généralement de montagne ou proches des reliefs), le
brochet pour les milieux cyprinicoles (rivières lentes de plaine), et
l’ombre ou les cyprinidés d’eaux vives (barbeau, vandoise…) pour
les milieux intermédiaires. Ces espèces sont exigeantes et présentes
dans tous les milieux naturels en bon état.
Cette caractérisation a été
établie pour des unités, appelées contextes, correspondant à des
ensembles qui permettent aux espèces indicatrices de réaliser
l’ensemble de leur cycle de vie.
La totalité du réseau
hydrographique français a été caractérisé en 2001. On constate que les
cours d'eau en bon état représentent seulement 15 % de la surface du
territoire, la plus grande partie étant perturbée (63%), et 22% sont dégradés.
Les contextes en
bon état sont essentiellement salmonicoles. Il en découle des différences régionales
très sensibles : la majorité des milieux en bon état se situent en partie
amont du réseau hydrographique, dans les massifs montagneux. Ceci peut être
relié au fait que ces zones sont celles qui sont les moins touchées par les
activités humaines, le facteur principal de dégradation des milieux y étant
l'hydro-électricité.
A l'inverse, les
zones moyennes (type intermédiaire), et aval (type cyprinicole), sont perturbées
ou dégradées. On observe en particulier qu'il n'existe pratiquement plus de
milieux cyprinicoles en bon état. Ces zones de plaine ou de pénéplaine sont
celles ou la densité humaine est la plus importante, avec pour corollaire la
juxtaposition des perturbations liées aux agglomérations, à l'industrie et à
l'agriculture intensive. La dégradation est très visible dans les grandes vallées
comme celles de la Loire, de la Garonne, dans les zones agricoles du bassin
parisien ou de l'ouest.
Cette première caractérisation sera ultérieurement affinée, en particulier
pour mieux décrire les milieux perturbés, qui recouvrent des situations très
différentes, pouvant être proches du bon état ou au contraire d'un état dégradé.
Enfin, les pêcheurs pourront interpréter également ces états comme des
cartes de situation des populations naturelles locales de certaines espèces,
truite et brochet en particulier, qui sont parmi celles qu'ils recherchent le
plus. Pour eux comme pour tous ceux qui ont en charge le rétablissement des
cours d’eau dans un état écologique satisfaisant, ces données sont irremplaçables.
Elles nous apprennent d’abord que des rivières qui paraissent en assez bon état
du point de vue physico chimique sont en réalité malades. Reste à connaître
les causes souvent multiples de ce mauvais fonctionnement des écosystèmes pour
tenter d’y remédier. Si l’enfoncement du lit, conséquence d’extractions
de matériaux, est le facteur principal, le rétablissement de bonnes conditions
écologiques prendra infiniment plus de temps que si le mal est du à une
interruption de communication entre la rivière et des zones humides encore présentes,
ou à des débits maintenus artificiellement trop bas. Il semble en outre que
des pollutions diffuses chroniques difficile à combattre perturbent de nombreux
cours d’eau alors qu’on ne les mesure pas toujours par des prélèvements
classiques.
Elles nous incitent ensuite à recommander aux pêcheurs des stratégies différentes
selon que les milieux naturels sont ou non capables de conserver ou de retrouver
rapidement un bon état de fonctionnement. Si par exemple l’idéal est une
gestion patrimoniale de populations naturelles sans déversements de poissons
issus d’élevage, il ne faut pas compter à court terme sur ce type d’action
dans des contextes complètement et durablement dégradés. La publication
chaque année de ces cartes, agrandies au niveau régional, aidera les décideurs
dans leurs choix.