Le Forum BEI 2003 qui s’est tenu à Dublin les 23 et 24 octobre avait pour thème les politiques à long terme de l’Europe pour l’énergie et l’eau. Il a réuni quelque 350 participants venus de toute l’Europe pour entendre 25 orateurs de renom et procéder avec eux à des échanges de vues.
Selon le commissaire européen Margot Wallström : « Les politiques énergétiques mondiales seront un jour conditionnées par les changements climatiques. L’objectif ultime est une économie produisant peu d’émissions de carbone, autrement dit une économie fondée sur des sources d’énergie renouvelables ». Dans le domaine de l’énergie, les scénarios à long terme construits sur une hypothèse de maintien de la situation actuelle annoncent tous plus ou moins un doublement des émissions de CO2 d’ici à 2030, alors que les scientifiques sont convaincus de la nécessité, pour stabiliser le climat, de réduire de 70 % les émissions globales de gaz à effet de serre, dont le plus important est le CO2. Dans le cadre du Protocole de Kyoto, l’UE s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 8 % par rapport au niveau de 1990 au cours de la période allant jusqu’à 2012, ce qui, selon la commissaire, devrait être considéré comme une « première étape seulement ».
Au niveau de l’UE, la stratégie de réduction des émissions de gaz à effet de serre repose sur le système d’échange des quotas d’émission dans la Communauté, qui entrera en vigueur en 2005. Le système en question prévoit que les États membres limitent les émissions de CO2 en provenance des installations industrielles en attribuant aux entreprises des quotas correspondant aux quantités de CO2 qu’elles seront autorisées à émettre. Ces quotas seront négociables, de telle sorte que les installations industrielles dont les émissions seront inférieures aux quotas qui leur ont été attribués pourront les revendre, tandis que les installations affichant un niveau d’émissions supérieur au seuil autorisé pourront acheter des suppléments de quotas. Ce système incitera les entreprises en mesure de réduire leurs émissions à un moindre coût à effectivement le faire. Il implique par ailleurs qu’en investissant dans une utilisation plus efficace de l’énergie et dans les énergies renouvelables, le promoteur d’un projet dégagera des quotas non utilisés dont la vente se traduira par un apport de liquidités.
Selon le Président de la BEI, M. Philippe Maystadt, ce système d’échange devrait favoriser un soutien accru de la Banque aux énergies renouvelables en contribuant à l’amélioration de la viabilité financière et de la bancabilité des projets. Le Président de la BEI a renouvelé la totale adhésion de la Banque à la politique de l’UE dans le domaine des changements climatiques et a fait remarquer que les opérations de financement de la Banque à l’appui de projets en rapport avec les énergies renouvelables avaient d’ores et déjà augmenté au cours des deux dernières années, pour atteindre quelque 20 % de l’ensemble des concours destinés au secteur de l’énergie. Cependant, il est également apparu clairement que pour réaliser les objectifs de la politique de l’UE en matière de changements climatiques, les prêts de la Banque devraient être complétés par des aides non remboursables, et, ce n’est pas le moins important, ,par des efforts de recherche-développement.
Le Forum a examiné les mesures prises par les États membres pour concrétiser les engagements souscrits dans le cadre du protocole de Kyoto. Il a passé en revue les énergies de substitution envisageables pour l’avenir, en s’intéressant à leur viabilité financière et aux stratégies d’investissement nécessaires à leur mise en valeur. Au cours de la deuxième journée, les travaux du Forum se sont concentrés sur les questions que soulève la gestion des ressources hydriques en Europe, sur les besoins d’investissement dans les secteurs de l’énergie et de l’eau, ainsi que sur les approches innovantes à développer en vue de leur financement.
Parmi les autres orateurs à s’être exprimés pendant le Forum figurent le Premier ministre irlandais, M. Bernie Ahern, le ministre des finances, M. Charlie McCreevy, le président de la Commission des Nations unies pour le développement durable, M. BØrge Brende et le ministre hongrois de l’économie et des transports, M. Istvan Csillag (pour la liste complète des orateurs, voir www.bei.org/forum ).
Résumant les conclusions du Forum, le Vice-président de la BEI, M. Michael G. Tutty, a déclaré qu’il est clairement ressorti des propos des participants qu’un environnement durable constitue un enjeu fondamental, aussi bien dans le secteur de l’énergie que dans celui de l’eau.
S’agissant de l’énergie, il a dit que les changements climatiques commençaient à dicter la politique mondiale en la matière, la nouvelle référence étant l’économie qui produit le moins de carbone possible en ayant recours aux énergies renouvelables. Les orateurs ont mis en avant la libéralisation des marchés dans laquelle ils voient une évolution positive, bien que soulevant des questions liées à la sécurité des approvisionnements. Sans réforme politique majeure, l’Europe restera fortement dépendante des combustibles fossiles importés, avec les conséquences que cela implique en termes d’émissions de CO2.
Sur le plan technologique, les orateurs ont indiqué que l’énergie éolienne demeurait la meilleure option en matière d’énergies renouvelables, d’autant qu’elle devient plus compétitive. Parmi les nouvelles options actuellement mises au point figurent les cellules photovoltaïques et les piles à combustible, mais il faudra encore du temps avant qu’elles n’apportent une contribution importante. En attendant, nous resterons fortement dépendants des sources d’énergie existantes ; c’est pourquoi nous devons les rendre aussi efficaces et respectueuses de l’environnement que possible, notamment en modifiant le comportement des consommateurs.
2 000 milliards de dollars : tel serait le montant des besoins d’investissement dans le secteur de l’énergie au cours des 30 prochaines années.
En ce qui concerne le secteur de l’eau, l’accent a été mis sur la
nécessité d’appliquer la directive-cadre de l’UE, qui constitue la référence en matière de développement durable pour ce secteur. Cela suppose un changement d’attitude qui passe par une meilleure intégration à tous les niveaux, une gestion intégrée des bassins hydrographiques et une réforme de l’agriculture. Il faudra, pour financer les investissements massifs que tout cela implique, imaginer des mécanismes d’un nouveau genre.
Dans sa description, devant les participants au Forum, de l’action de la BEI face à ces différents besoins, la Banque a clairement dit sa volonté de multiplier les interventions à l’appui de projets viables dans les secteurs des énergies renouvelables et de l’eau. S’agissant en particulier de l’énergie, la Banque a annoncé qu’elle mettait au point, à l’appui du système d’échange des quotas d’émission de gaz à effet de serre dans la Communauté, un mécanisme de financement spécifique, destiné aux entreprises qui investissent dans des projets de réduction des gaz à effet de serre, ainsi qu’un dispositif d’aide aux transactions, destiné à promouvoir les projets relevant du mécanisme de développement propre et du mécanisme de mise en oeuvre conjointe. Elle est également en train d’examiner la possibilité de créer un fonds d’investissement « Carbone » et un fonds « Vert ».